L’IDÉE REÇUE DE LA SEMAINE – « L’agriculture est archaïque et figée en Afrique»

Lorsqu’elle n’est pas sabordée par les choix politiques comme au Zimbabwe ou utilisée à des fins géopolitiques et militaires (des famines délibérément provoquées pour être utilisées comme arme), l’agriculture demeure en Afrique le paradoxe des paradoxes. Sur tout le continent, du nord au sud, d’est en ouest, les ressources abondent, les surfaces cultivables sont innombrables et le secteur primaire devrait occuper un rôle de premier plan dans la croissance économique.

Mais la réalité est tout autre. Rudimentaire et peu mécanisée, extensive plus qu’intensive en raison du coût des intrants, fragmentée en petites exploitations dont la superficie n’excède pas deux hectares et confrontée à l’insuffisance des ressources en eau, l’agriculture africaine souffre de pesanteurs économiques et culturelles dont l’ampleur provoque des tensions grandissantes sur fond d’explosion démographique.

La révolution verte prônée par de nombreux gouvernements au sortir des indépendances dans les années 1960 a fait long feu. Pis, la filière agricole satisfait de moins en moins les besoins des populations. Malgré de bonnes performances, particulièrement en Afrique de l’Ouest, où la campagne céréalière 2006-2007 affichait une hausse de 3 %, à 15 millions de tonnes, les instituts agronomiques et l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ne cessent de tirer la sonnette d’alarme sur la situation alimentaire du continent et le repli des rendements. Dans un rapport publié en 2005, l’un d’eux – l’américain International Food Policy Research Institute (Ifpri) – prédisait 38 millions d’enfants malnutris d’ici à 2015, contre 32 millions en 1997. Plus globalement, 250 millions de personnes sont sous-alimentées au sud du Sahara.

Les facteurs exogènes comme les aléas climatiques, la fluctuation des marchés internationaux, l’aide alimentaire déstabilisante pour les marchés domestiques ou les guerres ne suffisent pas à expliquer cette situation. Les choix opérés par les pouvoirs publics africains, qui ont préféré privilégier les cultures de rente ou les activités plus rémunératrices comme l’extraction pétrolière et minière, ont été des facteurs aggravants ayant précipité la ruine du paysannat et son exode vers les villes, même si 70 % des populations continuent de vivre en zone rurale. Faute d’incitations, d’accès aux crédits, de budgets ambitieux (moins de 1 % des budgets nationaux sont consacrés à l’agriculture) et d’infrastructures (routes, entrepôts), le secteur reste confiné et son essor hypothéqué par des pratiques comme la divagation des cheptels ou les feux de brousse.

À quoi s’ajoute un droit rural particulièrement rigide. Ancré dans les règles coutumières, ce dernier accorde rarement la propriété du sol à celui qui le cultive, ce qui n’incite guère le paysan à investir ou enrichir un sol dont il ne sait s’il pourra continuer de l’exploiter à l’avenir.

Malgré ces difficultés, certaines expériences prometteuses pourraient être généralisées. Celle de Tonka, au Mali, montre qu’une gestion durable des terres conjuguée au regroupement du paysannat en coopératives peut donner de très bons résultats. Dans des conditions climatiques rigoureuses, cette région du Nord malien est devenue un exemple de rendement et de productivité. Par leur connaissance du milieu et le recours à la polyculture, qui a permis de contrebalancer l’absence d’engrais et de freiner l’appauvrissement des sols, ces agriculteurs ont évité une situation plus dégradée encore. Ce qui prouve que le savoir-faire du paysan africain n’est pas à mettre en cause. Bien au contraire.

Volet important de l’aide au niveau mondial, la relance de l’agriculture est l’un des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD). Une priorité qui a incité de nombreux États à revoir leur approche du secteur, notamment du point de vue de la sécurité alimentaire. Reste que la diminution de la moitié du nombre de personnes souffrant de malnutrition d’ici à 2017 sera difficilement réalisable.

Expatmosaïque s’efforce de diffuser des informations exactes et à jour, et corrigera, dans la mesure du possible, les erreurs qui lui seront signalées. Toutefois, elle ne peut en aucun cas être tenue responsable de l’utilisation et de l’interprétation de l’information contenue dans cette publication.

Espace réservé pour vos liens sponsorisés

(Pour plus de renseignements prenez contact avec nous sur le site)

 ▬

Retour à la rubrique « L’idée reçue de la semaine »

Retour à la page d’accueil