AU FIL DES JOURS > L’IMAGE DU JOUR – Fusillade à Dallas : un tireur isolé sème la terreur en tuant cinq policiers
Les appels au calme et à la tolérance se multipliaient vendredi dans une Amérique profondément ébranlée par la tuerie de policiers perpétrée à Dallas par un tireur apparemment isolé, qui voulait venger les abus commis contre les Noirs par les forces de l’ordre. Le principal suspect, identifié par la police comme Micah Johnson, a été tué par une unité d’élite vendredi à l’aube. Cet ancien soldat noir de 25 ans semble avoir agi seul, a indiqué le ministre américain de la Sécurité intérieure, Jeh Johnson, qui a, comme la Maison-Blanche, exclu tout lien avec une « organisation terroriste » à ce stade de l’enquête.
À son domicile, les enquêteurs ont retrouvé du matériel servant à fabriquer des bombes ainsi que « des fusils, des munitions et un journal personnel de tactiques de combat », selon la police. Avant de mourir, Micah Johnson a dit à la police qu’il voulait « tuer des Blancs, en particulier des policiers blancs ». La fusillade a également fait neuf blessés, dont sept agents des forces de l’ordre. C’est le pire bilan enregistré par la police américaine depuis les attentats du 11 septembre 2001.
Sur un compte Facebook attribué à Micah Johnson et désactivé depuis, ce dernier semblait soutenir des organisations de défense des Noirs classées comme des groupes promouvant la haine par le Southern Poverty Law Center, qui suit ces mouvements aux États-Unis. Sur des photos de ce compte, on le voit le poing serré en l’air, rappelant le geste devenu symbole des luttes d’émancipation des Noirs en Amérique.
Dépourvu de casier judiciaire, Micah Johnson avait servi dans l’armée de terre américaine, notamment en Afghanistan de novembre 2013 à juillet 2014, a indiqué le Pentagone. Il vivait à Mesquite, en banlieue de Dallas, ont rapporté des médias américains.
La police de Dallas avait initialement évoqué « deux snipers opérant depuis des positions en hauteur » et avait interpellé plusieurs suspects, mais n’avait plus mentionné l’hypothèse d’une opération coordonnée vendredi. Jeudi soir, Micah Johnson s’est retranché durant des heures dans un bâtiment où il a finalement été tué avec un robot policier télécommandé, qui a fait détoner une bombe.
Chaos total
Le massacre s’est produit pendant une manifestation dénonçant les brutalités policières contre les Noirs, faisant basculer le centre de Dallas dans le chaos jeudi soir. Les témoins sur place, et notamment les manifestants rassemblés pour dénoncer les abus policiers, ont relaté des scènes de panique, des tirs nourris, des habitants s’enfuyant dans toutes les directions. « Il y avait des Noirs, des Blancs, des Latinos, tout le monde. Et il y a eu [les coups de feu] sortis de nulle part », a relaté un témoin. « C’était le chaos total, c’est complètement fou ».
Plusieurs autres suspects ont été placés en garde à vue, a par ailleurs indiqué le maire de Dallas, Mike Rawlings, sans préciser le nombre exact. Les médias américains ont diffusé une vidéo montrant le principal tireur, que l’on voit épauler un fusil d’assaut et faire feu sur des cibles non identifiées. «C’est lui, là, à côté de la colonne blanche, regardez, il tire vers la gauche, tire vers la droite, tire de l’autre côté, on voit qu’il vise quelqu’un », commente un témoin, Ismael DeJesus, qui filmait depuis un hôtel proche. « Il y avait un policier qui arrivait et qui a essayé de l’avoir, mais ça s’est mal terminé [pour l’agent]. C’était une exécution, franchement. Alors qu’il était déjà à terre, l’homme a encore tiré sur lui trois ou quatre fois », dit-il.
Racisme latent
Le rassemblement à Dallas s’inscrivait dans le cadre de plusieurs manifestations organisées à travers les États-Unis pour protester contre la mort de deux hommes noirs abattus par la police cette semaine, l’un en Louisiane (sud), l’autre dans le Minnesota (nord), des scènes filmées qui avaient choqué l’opinion américaine.
En pointe de ces protestations, le mouvement «Black Lives Matter» («les vies noires comptent») s’est défendu d’avoir jeté de l’huile sur le feu. « Black Lives Matter combat pour la dignité, la justice et la liberté. Pas le meurtre », a fait savoir l’organisation.
Devant des milliers de personnes rassemblées vendredi après-midi au cœur de la ville pour un moment de recueillement œcuménique, le maire de Dallas, Mike Rawlings, a appelé à guérir les blessures du racisme rongeant le pays.
« Notre communauté peut-elle, sincèrement et profondément, comprendre la souffrance que la discrimination raciale et le plus grand péché de l’Amérique, l’esclavage, a créé à travers l’histoire, pouvons-nous le comprendre ? », a-t-il déclaré.
La ministre américaine de la Justice a elle lancé un appel solennel au calme et au rejet de la haine. « À vous tous Américains, je vous demande, je vous implore, ne laissez pas ce pays basculer à la faveur de ce qui s’est produit cette semaine », a déclaré Loretta Lynch.
Le Devoir
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